top of page

Résiliation des rapports de travail sans préavis – art. 337 CO s’appliquant à titre de droit public supplétif 

TF 8C_376/2023 du 29 novembre 2023 - droit de la fonction publique et du travail

Résumé:

A a travaillé comme assistant pastoral pour la Collectivité ecclésiastique cantonale catholique-romaine de la République et canton du Jura (CEC). Il n’est pas contesté qu’il s’agit de rapport de travail de droit public. 

Une procédure pénale est instruite à l’encontre d’A, notamment pour actes d'ordre sexuel avec des enfants, éventuellement contrainte sexuelle. 

Le 26 avril 2022, le Ministère public a informé la CEC de ladite procédure pénale contre A. Ainsi, le 2 mai 2022, la CEC a informé A qu’au vu des faits qui lui étaient reprochés, une procédure administrative était ouverte à son encontre afin d’évaluer si la poursuite des rapports de travail était possible et, si oui, à quelles conditions. A avait jusqu’au 12 mai 2022 pour exercer son droit d’être entendu. Par décision du 30 mai 2022, la CEC a résilié avec effet immédiat les rapports de travail de A. 

A recourt jusqu’au Tribunal fédéral, dès lors qu’il considère (notamment) que la résiliation des rapports de travail serait intervenue tardivement, soit après le délai de réflexion pour se faire. 

A titre liminaire, le Tribunal fédéral rappelle que l’ordonnance sur le personnel de la CEC ne contient pas de disposition en matière de résiliation immédiate des rapports de travail, si bien que selon l’art. 50 al. 1 de cette ordonnance, l’art. 337 CO est applicable à titre de droit public supplétif. 

La jurisprudence admet que la partie souhaitant résilier le contrat avec effet immédiat dispose d’un court délai de réflexion pour signifier la rupture immédiate des relations de travail, sous peine de déchéance. Un délai de réflexion de deux à trois jours ouvrables est suffisant pour réfléchir et prendre des renseignements juridiques, étant précisé que les week-ends et jours fériés ne sont pas pris en considération. Un délai supplémentaire est toléré s’il se justifie par les exigences pratiques de la vie quotidienne et économique. 

Ces principes jurisprudentiels, développés au regard de l’art. 337 CO, ne sont pas sans autres transposables aux rapports de travail de droit public. En effet, dans ce domaine, le licenciement se fait en général par voie de décision motivée et il est souvent précédé d’une enquête, en particulier quand il s’agit d’étayer ou d’infirmer des soupçons. L’intéressé bénéfice en outre des garanties propres à la procédure administrative, en particulier du droit d’être entendu. 

Enfin, indépendamment de ces garanties, les contingences liées aux procédures internes d'une administration ne permettent souvent pas de prendre une décision immédiate, surtout lorsque la décision ne peut pas être prise par le supérieur hiérarchique direct, mais dépend de l'autorité d'engagement ou d'une autorité de surveillance. Des motifs objectifs (droit d'être entendu, spécificités de la procédure administrative) peuvent ainsi justifier selon les cas d'accorder à l'employeur de droit public un délai de réaction plus long qu'en droit privé, mais celui-ci ne doit pas pour autant laisser traîner les choses. 

Ainsi, dans le cas d’espèce, avant de rejeter d’autres griefs soulevés par A, le Tribunal fédéral considère que le licenciement est intervenu environ un mois après la communication officielle du procureur général et que la décision de licenciement a été prise non pas par le supérieur hiérarchique de A, mais par un collège de plusieurs personnes, si bien qu’il n’apparaît pas insoutenable de retenir que la CEC a rendu sa décision dans un délai pouvant encore être qualifié de raisonnable.

Le recours de A est ainsi rejeté. 

​

bottom of page